"Et si tout le monde avait droit à une nouvelle chance après avoir commis une grave erreur?"
Zarr Sara
272 pages
Éditions Hachette (2017)
Collection Hors-série
Extrait :“J’avais treize ans quand mon père m’a surprise avec Tommy Webber.
Tommy avait dix-sept ans.
Je ne l’aimais pas.
L’histoire remonte à presque trois ans.
Depuis, mon père ne m’a plus jamais regardée dans les yeux.”
Deanna voudrait se débarrasser de cette réputation de fille facile qui lui colle à la peau. Elle l’a décidé : cet été sera celui de la seconde chance. En trouvant un petit boulot dans la pizzeria du coin, elle compte mettre de l’argent de côté. Suffisamment pour partir loin de cette ville, loin des préjugés, loin de cette image qui ne lui ressemble pas.
Elle n’imaginait pas que le prix à payer pour se racheter une vie serait si élevé : devoir affronter chaque jour la présence de Tommy, qui travaille avec elle…
« Parfois, voilà ce qui m’arrivait :
Je commençais à revivre tout et je ne pouvais pas m’empêcher de penser et si. Et si je n’avais pas rencontré Tommy, et si j’avais été assez dégourdie pour lui dire de me laisser tranquille, et si mon père ne nous avait pas suivis à Montara ce soir-là ? Ou, s’il l’avait fait, s’il avait été le genre de père à me prendre dans ses bras, à me caresser les cheveux et à me demander « ça va » ?
Je me mettais à penser et si tout ça et je pouvais rester des heures sans bouger, à ressasser encore et encore jusqu’à sentir montrer les larmes, et là, je m’obligeais à arrêter.
Je déteste pleurer. Une des dernière fois que j’ai pleuré, ce fut quand Tommy et moi, on coucha ensemble pour la première fois, des mois avant le soir où mon père nous tomba dessus. Ça faisait si mal et Tommy était défoncé et ne se rendait même pas compte que j’essayais de le ralentir et il y avait à la radio cette pub débile pour une pilule de régime. Je sentais les larmes couler sur le côté de ma figure et goutter un peu dans mes oreilles. Le pire fut quand Tommy s’aperçut que je pleurais et se fit tout gentil : « Hé, Didi, pleure pas, ce sera mieux plus tard, tu es si jolie… Allez, Didi, allez. » C’était comme s’il avait prise sur moi, comme s’il avait vu au fond de moi alors qu’il n’y avait pas sa place.»
Je commençais à revivre tout et je ne pouvais pas m’empêcher de penser et si. Et si je n’avais pas rencontré Tommy, et si j’avais été assez dégourdie pour lui dire de me laisser tranquille, et si mon père ne nous avait pas suivis à Montara ce soir-là ? Ou, s’il l’avait fait, s’il avait été le genre de père à me prendre dans ses bras, à me caresser les cheveux et à me demander « ça va » ?
Je me mettais à penser et si tout ça et je pouvais rester des heures sans bouger, à ressasser encore et encore jusqu’à sentir montrer les larmes, et là, je m’obligeais à arrêter.
Je déteste pleurer. Une des dernière fois que j’ai pleuré, ce fut quand Tommy et moi, on coucha ensemble pour la première fois, des mois avant le soir où mon père nous tomba dessus. Ça faisait si mal et Tommy était défoncé et ne se rendait même pas compte que j’essayais de le ralentir et il y avait à la radio cette pub débile pour une pilule de régime. Je sentais les larmes couler sur le côté de ma figure et goutter un peu dans mes oreilles. Le pire fut quand Tommy s’aperçut que je pleurais et se fit tout gentil : « Hé, Didi, pleure pas, ce sera mieux plus tard, tu es si jolie… Allez, Didi, allez. » C’était comme s’il avait prise sur moi, comme s’il avait vu au fond de moi alors qu’il n’y avait pas sa place.»
Mon avis :
C’est l’histoire d’une jeune fille qui doit vivre avec les conséquences de ses actes. À l'âge de treize ans, le père de Deanna Lambert la surprend avec l’ami de son frère, Tommy Webber, de quatre ans son aîné, dans une position compromettante dans la voiture du garçon. Depuis ce jour, Deanna a vu sa vie radicalement changer, Tommy n’ayant pu s’empêcher de se vanter de la situation à tout-va. Trois ans plus tard, Deanna a pris conscience de son erreur : elle n’a jamais été amoureuse de Tommy, ne sait pas ce qui lui est passé par la tête d’accepter d’être avec lui et souhaite désormais tirer un trait sur son passé. Seulement, personne ne semble avoir oublié son écart de conduite. Pire que cela, sa réputation s’est vue assimiler à celle d’une salope, même auprès de son propre père. Les seules personnes auxquelles elle fait confiance sont son frère aîné et sa petite amie qui vivent au sous-sol avec leur bébé et ses deux meilleurs amis, Lee et Jason. Pour tous les autres, elle est juste une fille facile. Alors qu’elle recherche un travail pour l’été afin d’économiser assez d’argent pour partir de chez ses parents, une petite pizzeria accepte de l’embaucher. Mais en prenant ce poste, Deanna ne s’attendait pas à devoir faire face à son passé : Tommy travaille également à la pizzeria.
Sara Zarr nous offre, à travers Story of a Girl, un récit surprenant, touchant et empreint d’un certain réalisme. Dans notre société actuelle, où l’apparence prévaut sur le reste, une réputation peut très vite être salie par des ragots malveillants et, la situation peut vite devenir insupportable pour la personne visée, surtout à l’adolescence... Entre eux, à cet âge-là, ils ne sont pas toujours conscients de ce qu’ils font. Mais cela est un comportement inadmissible pour des adultes qui donnent foi à des rumeurs comme celles qui touchent Deanna. C’est un récit qui met en avant des thèmes forts et déstabilisants. Mais c’est avant tout le voyage émotionnel de Deanna que l’on découvre dans l’ouvrage : son besoin de reconnaissance de son père, son sentiment de solitude qui l'étreint constamment, sa honte et sa culpabilité… Le rythme est lent, les rebondissements sont peu nombreux. Mais peu importante, les sentiments que tentent de refouler Deanna, la souffrance qu’elle garde constamment en elle sont très présents tout au long de l’histoire et donnent une certaine intensité au récit. C’est une lecture qui m’a particulièrement touchée : Deanna est bouleversante, et il lui faut beaucoup de courage pour continuer à avancer alors qu’elle se retrouve à faire face contre tous. Je ne l’attendais pas à accrocher autant à ce livre : c’est émouvant, dur. On ne peut que compatir à son histoire.
★★★★☆
Stéphanie
Sara Zarr est l'autuer acclamée de quatre roman pour eunes adultes dont deux ont été traduits en France. Elle a gagné plusieurs prix pour son oeuvre.
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