"Un souvenir enfoui depuis des lustres... "
Harper Jane
400 pages
Éditions Kero (2017)
Collection Littérature étrangère
Extrait :Kiewarra. Petite communauté rurale du sud-est de l’Australie. Écrasée par le soleil, terrassée par une sécheresse sans précédent. Sa poussière. Son bétail émacié. Ses fermiers désespérés.
Désespérés au point de tuer femme et enfant, et de retourner l’arme contre soi-même ? C’est ce qui est arrivé à Luke Hadler, et Aaron Falk, son ami d’enfance, n’a aucune raison d’en douter. S’il n’y avait pas ces quelques mots arrivés par la poste :
Luke a menti. Tu as menti. Sois présent aux funérailles…
Revenir à Kiewarra est la dernière chose dont Aaron a envie. Trop vives sont encore les blessures de son départ précipité des années auparavant. Trop dangereux le secret qu’il a gardé pendant tout ce temps. Mais Aaron a une dette, et quelqu’un a décidé que le moment est venu de la payer…
« A la ferme, la mort n’était pas une étrangère. quant aux mouches à viande, elles n’étaient pas regardantes et ne faisaient guère la différence entre une charogne et un cadavre humain.
La sécheresse, cet été-là, n’avait laissé que l’embarras du choix aux mouches, qui s’affairaient en quête d’yeux vides et de blessures poisseuses tandis que les fermiers de Kiewarra Bridge pointaient leurs fusils sur le bétail étique. Pas de pluie, pas de fourrage. Et l’absence de fourrage obligeait à des décisions difficiles, alors que la bourgade miroitait depuis des jours et des jours sous l’ardeur d’un ciel uniformément bleu. »
La sécheresse, cet été-là, n’avait laissé que l’embarras du choix aux mouches, qui s’affairaient en quête d’yeux vides et de blessures poisseuses tandis que les fermiers de Kiewarra Bridge pointaient leurs fusils sur le bétail étique. Pas de pluie, pas de fourrage. Et l’absence de fourrage obligeait à des décisions difficiles, alors que la bourgade miroitait depuis des jours et des jours sous l’ardeur d’un ciel uniformément bleu. »
Mon avis :
L'agent Aaron Falk est sommé de revenir dans sa ville natale pour assister aux funérailles de son meilleur ami, Luke, qui s'est apparemment suicidé après avoir tué sa femme, Karen, et de leur fils de 6 ans. Mais son retour fait rapidement resurgir d’anciennes rancœurs à son égard : par la passé, Falk et son père ont dû précipitamment quitter Kiewarra quand une partie de la ville les accusait d’être responsables de la mort brutale d’une amie d’Aaron, Ellie, retrouvée étranglée avec son nom inscrit sur un papier dans sa poche. Luke lui a donné un alibi, mais plus d'une personne savait qu'il mentait. Quand les parents de Luke demandent à Falk de découvrir la vérité sur la mort de son ami et de sa famille, les mensonges et les secrets trop longtemps enfouis font peu à peu surface. Et si la mort de Luke n’était pas étrangère à celle d’Ellie?
Jane Harper nous offre avec Canicule une intrigue bien ficelée où elle garde constamment dans l’ombre l’identité du coupable, les raisons qui l’ont animée à tuer un enfant et le lien que ces trois morts peut avoir avec ce qui est arrivé des années plus tôt. En nous offrant quelques flashbacks du passé, on parvient à émettre des hypothèses sur ce qui s’est produit à cette époque, se demandant si Aaron ou Luke n’auraient pas quelque chose à se reprocher. Et les deux récits s'emmêlent et se mélangent à la perfection. Kiewarra est une petite commune rurale qui souffre depuis plusieurs mois d'une sécheresse intense. Le suicide de Luke pourrait facilement s'expliquer par l’état de sa ferme, mais Falk ne semble pas convaincu. Le risque de feu, la pauvreté qui touche toute la commune semble aiguiser les nerfs et tout le monde devient coupable aux yeux de tous. Chacun devient un suspect potable à nos yeux également. Dans cette ambiance électrique, Falk essaie de se concentrer sur son enquête sans se laisser rattraper par le passé. Mais ce n’est pas toujours aisé de faire fi du regard des autres. Dès les premiers chapitres, nous sommes happés par l’intrigue et emportés dans le récit qui ne s’attarde pas que sur Aaron, mais aussi sur les familles qui vivent à Kiewarra. La ville et son histoire deviennent, comme chaque protagoniste que nous rencontrons, des éléments clés dans l’intrigue. J’ai apprécié l’ambiance dégagée par le récit, un genre de passivité douce et chaude propre à ce genre de village isolé, qui nous entraîne jusqu’au bout de l’ouvrage.
★★★★☆
Journaliste, Jane Harper travaille depuis de nombreuses années pour la presse écrite.
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